Le jour où j'ai vu les vampires, Mister X et où mon cerveau a disparu

Quand je te tease avec des titres pareils, je sais que tu kiffes, comme disent les jeunes (est-ce que les jeunes disent encore ça, d'ailleurs ?) (s'il faut je suis déjà has been avec des expressions de ce genre).

Vendredi dernier, j'ai eu une journée que je qualifierais de "relou", pour rester polie (et ça, c'est pareil, ça se dit, encore, "relou" ?)

Déjà, je me lève à 6h45 pour aller me faire aspirer le sang au labo à deux pas de chez moi. Sauf que, la gueule de traviole et le mascara qui pègue, j'arrive à 7h devant la porte et je vois qu'en fait, ça ouvre à 7h30. Je l'avais mauvaise. Je repars chez moi, l'haleine encore chargée, et je m'active parce que maintenant que je suis réveillée, autant être utile. Je prépare mon p'tit dej histoire de me jeter dessus dès mon retour comme la famine sur le pauvre peuple (ou, comme dirait mon père : comme la petite vérole sur le bas clergé) (me demande pas d'où il a inventé cette expression, mais c'est un classique chez moi).

7h30, j'arrive au labo, y'a déjà 3 vieux avant moi. Alors sont mignons les vieux mais je sais pas comment ils ont fait pour me coiffer au poteau, j'étais déjà pas jouasse, là je peux te dire que dans ma tête c'était l'hécatombe gériatrique. Mais bref, ça a été relativement vite. La laborantine a juste mis 50 ans à trouver une veine, mais c'est pas sa faute, j'ai des veines timides, qu'est-ce que tu veux. Elles sont sûrement traumatisées de l'aiguille. Du coup à chaque fois je me fais gifler l'intérieur du coude sauvagement et au final on me pique sur la main. Je leur dis tout le temps de piquer directos là mais c'est un challenge pour eux, on voit pas de veine donc faut en débusquer une. C'est comme ça que des fois je me retrouve avec 3 pansements à chaque bras... Enfin bon...

Toi aussi quand tu vas faire une prise de sang tu dis que tu vas chez les vampires ?

Ensuite, à 9h j'ai dû m'appliquer une crème anesthésiante sur Dumber. Donc je fais le bignou et là je vois quoi ? UN POIL !!!!! Nom de Zeus ! Donc je me jette sur ma pince à épiler et je vérifie bien parce que j'ai RDV 1h après chez Mister X et j'ai pas envie d'y aller le nichon velu (je t'avais prévenu que toi et moi on serait super intimes) (je sais, t'en attendais pas autant) (mais tu ne pourras pas dire que je fais de la langue de bois, c'est pas mon genre) (moi c'est plutôt la langue de pute puisqu'on en est aux confidences) Tu vas voir l'importance de ce détail plus loin (je parle du poil parce qu'avec mes 15 digressions je suis sûre que je t'ai encore perdu).

Bon, bien sûr le radiologue a 15 min de retard mais sinon ça va. Son assistante est sympa, je les ai bien fait rire en leur disant qu'en fait Mister T est top, ils m'ont dit que j'avais dû lui taper dans l'oeil. Mais non, j'étais avec ma mère et le doc a l'âge d'être mon père, voyons, soyons sérieux une minute je vous prie. Surtout qu'il m'imaginait sûrement déjà chauve à te faire un remake de l'exorciste dans ma chambre en mode effets secondaires de la chimio.

T'as vu, je suis sympa, au cas où des gamins soient dans le coin je mets que des photos softs. Parce que j'aurais pu mettre celle où elle... Enfin tu sais quoi...

Le radiologue (qui doit me poser un clip = un repère dans Albert au cas où il se barre complètement, que le chirurgien sache où opérer et nettoyer les alentours) (t'as vu je t'explique tout, tu diras pas que je te mâche pas le travail, hein) me demande de lever le bras droit et de le mettre derrière la tête, pour l'écho, tu sais, on voit mieux (mais si, tu sais, et sinon, maintenant tu sais).

Et là, c'est le drame : j'ai oublié de faire place nette sous mes bras. C'est pas l'Amazonie sauvage en période de mousson automnale non plus, mais ça commence à repousser. Donc trop tard, j'ai un zéro pointé en glamourittude. Déjà Dumber commence à rivaliser avec Edward aux mains d'argents question cicatrices, on peut dire que pour draguer, je suis plus au point (mais non, DH, en vrai je ne drague pas) (c'est juste comme ça que je dis ças) (allez, va pas bouder ! je drague pas, je te dis) (et puis là au moins t'es sûr que je me fais plus draguer entre les poils et tout ça...)

Plus tard dans la journée, j'ai une IRM cérébrale à passer pour compléter le bilan pré-chimio. On est un peu juste question timing mais je dis à ma mère de se détendre du bulbe parce qu'ils sont à la bourre partout. Bien sûr, je débarque et ils m'attendaient. Je n'avais que 5 min de retard mais la manipulatrice me dit que pour une fois ils étaient à l'avance. En plus, je savais pas donc moi je suis même allée faire un p'tit pipi et elle m'attendait devant les toilettes. La honte, quoi.

Heureusement, je me suis confondue en excuses et elle l'a super bien pris et on s'est bien marrées au final. Quand t'as un cancer les gens t'en veulent pas longtemps, mouhahaha (quoi, toi aussi t'en profiterais à ma place)

Puis, la radiologue est venue m'annoncer qu'elle n'avait rien trouvé à mon IRM. J'avais envie de lui dire "Même pas un petit cerveau ? Un de blonde, ça ira hein, c'est ce que je suis à la base, je le prendrai pas mal." Non. Rien. Et que je dois me rassurer, donc en fait, pour elle mieux vaut ne pas avoir de cerveau qu'un de blonde ? (comment ça, je fais des raccourcis ?) (et là tu découvre que je cumule : blonde et cancéreuse... pas aidée la fille, tu me prends en pitié là normalement)

Voilà, et moi en fait ben y'a même pas le petit bidule au milieu... et mon nez est moins gros... Bien sûr que si !

Au final, c'était une journée avec une pause au milieu où j'ai papoté avec R., je te parlais d'elle ICI si tu fais pas juste semblant de me lire, rappelle-toi, elle s'est pas laissée emmerder par son cancer. Elle est venue passer tout le vendredi avec ma petite maman et moi. Elle est en fin de chimio, je prends la relève ! S'agirait pas de faiblir, hein. Et elle m'a offert un carnet (ligné, je lui ai dit qu'elle avait assuré parce que je sais pas écrire droit sans lignes) où je vais pouvoir écrire un tas de conneries quand je serai en cure de chimio ! Elle au top R. (sauf quand elle dit que je l'emmerde mais je lui réponds gentiment qu'elle me fait tout autant chier) (c'est notre langage pour nous dire qu'on s'aime) (on accompagne la parole de quelques gestes du même genre, on s'aime je te dis)

Voilà, ça, c'était mon vendredi-pourri. Mais j'ai des journées plus relou encore qui arrivent, sauf que je suis pas toute seule, j'ai ma petite maman, ma petite famille, mes amies, vos super commentaires ici ou sur FB (oui je fais un discours de remerciements comme si j'étais au Oscars, et alors ?) bref, je suis hyper bien entourée donc je crains dégun. Je sais que je vais sûrement en baver des effets secondaires mais je me prends pas la tête, j'aviserai le moment venu. M'angoisser pour des trucs contre lesquels je ne peux rien, c'est plus mon genre. Ce bâtard d'Albert aura au moins apporté ça dans ses bagages. D'ailleurs, je lui ai dit de pas défaire ses valises, ce serait con parce qu'il va devoir dégager rapido...